[Initialement publié le 23 septembre 2022]

Augan. Charmante commune rurale du Morbihan, dans les terres, entre Vannes et Rennes à quelques encablures de Ploërmel. Dans le bourg, on peut encore croiser de vieux tracteurs Renault, signature typique des années 80, avec au volant un ancien paysan décontracté. En face de l’église, l’ancienne Poste, fermée à la fin des années 2000 a fière allure. Au-dessus de la porte d’entrée, on peut lire « Allumez vos postes sur le 106.6 MHz ! » et sur le côté le logo caractéristique de Timbre FM : une pastille qui rappelle les tampons des lettres, où « 56800 Augan » prend autant de place que le nom de la radio. Il faut dire que l’une et l’autre sont indissociables.

Ce midi-là, en avril 2022, quelques salarié.e.s et bénévoles de Timbre FM se retrouvent pour déjeuner. L’occasion de revenir sur son histoire. En 2009, l’Association Pour une Radio Associative et Locale à Augan (APRALA) est créée par un groupe d’habitant.e.s. Son premier président a travaillé à Radio France, notamment à RFI et connaît son sujet. Le projet prend forme avec l’envie d’utiliser la radio comme un outil de rencontres et de partages, avec l’envie de se marrer aussi. Plus encore, cette fin de décennies 2000 marque un tournant dans l’évolution de la commune. À quelques mètres de Timbre FM se monte Le Champ Commun. L’auberge voit le jour en 2010, c’est un lieu d’expérimentation sociale et culturelle qui abrite : une épicerie, un bar, un restaurant, une auberge, une microbrasserie dans le sous-sol, un relais poste, un centre de formation. Rien que cela. Une dynamique commune s’enclenche naturellement entre le lieu de vie et la radio. Le leitmotiv : créer du lien. Les services publics s’en vont ? Qu’à cela ne tienne, les auganais.e.s expérimentent !

Une fréquence permanente à Augan

En 2009, donc, notre Radio s’installe dans les locaux de l’ancienne Poste, mis à disposition par la mairie. Le lieu de vie incontournable n’est pas dévoyé de son sens premier, il reste ainsi un lieu de passage, de sociabilité et de communication. Les lettres ont laissé place aux ondes. Au début, la station n’émet que de juin à août, du jeudi 18h au dimanche 22h sur le 92.0 MHz. Puis l’association se lance l’objectif d’être une radio permanente ! Fanny Gimeno est alors embauchée en 2012 afin de produire le dossier de candidature à adresser au CSA (désormais l’ARCOM) « ça a été un long travail, il fallait aller voir les acteurs du territoire, expliquer le projet » rappelle la femme, dont le poste est désormais dédié aux ateliers radio. Et ça marche : Timbre FM obtient sa fréquence actuelle ! Les hostilités sont lancées et l’on ne tarde pas à embaucher Hervé Hamery à la technique, Anne Marion, qui laissera sa place à Loïc Le Hir pour la formation et le lien avec les bénévoles, de l’antenne, de la communication… Il y a désormais quatre salarié.e.s « on a tous commencé à 20h, puis 28h et enfin 32h. À chaque fois l’équipe a fait le choix d’embaucher une nouvelle personne au lieu d’augmenter nos heures », rappelle Fanny de sa voix calme, qui inspire à l’écoute.

Un choix de direction

Autour de la table du Champs Commun, où nous sommes installé.e.s, ce qui marque, c’est la facilité de chacun.e à trouver sa place dans la conversation, ça rigole, ça débat. Ok, tous et toutes se connaissent bien, mais tous et toutes mettent un point d’honneur à mettre à l’aise chaque nouvelle personne. Une ambiance qui découle peut-être du choix de direction pris par l’association : le conseil d’administration est composé de huit personnes et fonctionne à la collégiale. Il n’y a pas de président.e et si certain.e sont spécialisé.e sur des dossiers spécifiques, cela ne leur donne pas plus de poids au sein du CA. De la même façon, il n’y a pas de coordinateur au sein de la radio, « l’éthique qu’essaie de transmettre le CA c’est que l’on n’est pas dans un fonctionnement descendant. Il y a vraiment une histoire de direction et d’administration collégiales, de prise de décisions collégiale, avec une dimension collective très forte », explique Aurélien, l’actuel salarié qui gère l’administration. Alors certes, il n’y a pas que des avantages, les choses peuvent parfois prendre du temps par exemple. Mais le fonctionnement est sain et vraiment démocratique. Une particularité en Bretagne ! C’est la seule des radios de la CORLAB à fonctionner de la sorte.

Des bénévoles à l’antenne

La ligne éditoriale, quant à elle, est orientée vers le territoire auganais et prône l’ouverture au monde. Animer la vie locale et soutenir les initiatives citoyennes et associatives fait partie de son ADN. L’une des spécificités de Timbre FM réside dans le fait que les émissions diffusées sont réalisées presque exclusivement par les bénévoles. Loïc anime cependant quelques fois par semaine Le Timbre du coin, qui fait la part belle aux acteurs sociaux culturels du territoire. L’association, forte de ses 80 bénévoles, a en effet assez de ressource. C’est une quinzaine de programmes autoproduits dans les studios qui sont diffusés chaque semaine ! De la traditionnelle émission musicale en passant par une émission pédagogique à destination des élèves (voir plus bas). Des recru.e.s qui sont formé.e.s par Loïc, soutenue et aider par l’équipe, « les propositions d’émissions sont validées par une commission éditoriale », précise Aurélien, grand brun à l’allure affable.

Des ateliers radio

Une programmation complétée par des programmes de la CORLAB, d’autres radios et surtout par les ateliers radio qu’anime Fanny. « À la base je suis animatrice et notre ancienne collègue Anne Marion était éducatrice spécialisée, faire des ateliers c’était une évidence ». Un pan important de la grille des programmes « tout ce qui est fait est diffusé ! », rappelle Fanny, plus souvent sur le terrain qu’à la radio. Un travail essentiel qui colle aux valeurs défendues par les timbrés. Sur la saison 2021-2022, c’est une trentaine de projets qui ont été menés, de l’éducation aux médias aux ateliers avec des bénéficiaires du RSA, « la radio est un bon prétexte pour faire des choses ensemble. Dans ce cadre, on a mené une action collective avec sept personnes et toutes les semaines on a produit des émissions. Ça a été très fort. La radio c’est un outil pour donner la parole et elle est rendue publique par la diffusion. Ça peut aider à sortir de l’isolement, à acquérir une confiance en soi… Et puis réunir des gens sur un temps de partage, ça sort du commun des activités et ça, tout le monde en aurait besoin ! », là-dessus, on ne contredira pas Fanny !