C’est le milieu de l’après-midi. Lucie Louâpre, journaliste de la quotidienne de Canal B « L’ARÈNE », prépare son émission diffusée à partir de 17h. Dans le bureau qu’elle partage avec ses collègues, on sent une bonne ambiance du genre sororité, témoignant aussi du renouveau de la radio : exit l’asso musicale masculine, désormais les femmes prennent aussi possession de Canal B !

Nous nous mettons dans la salle de pause de Canal B pour discuter. Sur la table trônent trois flacons de désinfectant pour les mains et à côté de nous, des cartons de CD. Une affiche où il est écrit « ces bacs s’autodétruiront le 18/10/22 » les surplombe. La jeune femme m’explique que s’ils sont là c’est qu’ils ne correspondent pas au style Canal B et sont mis à disposition de qui veut avant un avenir plus incertain. « Mais j’en ai trouvé un qui me plaît quand même », confie-t-elle amusée, mimant un rictus facial de déshonneur, assumant totalement son « guilty pleasure ». Lucie Louâpre est une jeune femme sympathique et curieuse avec qui il est plaisant et facile de converser.

La jeune femme travaille à Canal B depuis 2018, officiellement sous le terme d’« animatrice-technico-réalisatrice », le fameux « ATR » des conventions collectives des asso’. Mais entre elle et la Canal B, c’est une longue histoire.


« J’étais tétanisée à l’idée de parler dans un micro ! »


Passée par une classe préparatoire « littérature et sciences sociales » qui ne lui plaît guère, elle cherche alors « un plan de secours ». Ce sera le DUT de journalisme à Lannion (22). Au départ, la radio ne fait pas partie de ses projets « enfant, je n’ai pas « baigné » dans la radio… Dans le son oui, l’immersion sonore par exemple m’a toujours fascinée. Alors peut-être qu’il y avait un truc », analyse-t-elle, avant de continuer : « et puis enfant, j’ai le souvenir d’aimer parler toute seule devant le miroir… j’aurais pu être youtubeuse beauté », lâche-t-elle en rigolant, avec cette autodérision naturelle caractéristique. Puis, vient le moment de trouver un stage. C’est à ce moment qu’elle découvre Canal B. « Je suis originaire de la région rennaise, mais à la limite de diffusion (40km autour de Rennes, NDLR), je ne l’avais jamais écouté.e ni même entendu parler ». C’est par hasard, donc, que l’étudiante d’alors, débarque alors dans les studios de Maurepas. « Les animat.eur.rice.s avaient une prestance. Il y avait aussi la couleur musicale et culturelle de Canal B. Et puis, c’était très impressionnant l’aspect direct de la radio. J’étais tétanisée à l’idée de parler dans un micro ! ».

Tétanisée, mais surtout charmée ! « Avant cela, j’avais eu une première expérience journalistique en presse écrite, mais ici, je découvrais une liberté de ton », résume-t-elle. L’expérience est concluante et elle revient peu de temps après dans le cadre d’un service civique. Puis elle sera tour à tour bénévole, membre du CA… Et un jour, son prédécesseur s’en va et c’est elle qui est choisie pour reprendre son poste.

En charge de la quotidienne


Depuis quatre ans, elle anime donc « L’arène », la quotidienne d’information locale, avec du reportage, des chroniques et des invité.e.s. « Au début c’était une émission de 28 minutes, désormais c’est plutôt 45-50 minutes ». Entre autres sujets abordés : la vie politique, la vie rurale et citadine, les mouvements sociaux, le féminisme, les sujets LGBTQI+, etc. En revanche, ici, pas de sujets sur le sport professionnel et l’on ne traite pas des faits divers, à une exception près : si ce dernier se révèle être un fait de société. Et elle qui connaît bien la radio, a-t-elle évolué depuis son arrivée ? « Oui, ça bouge à Canal B ! Les femmes prennent leurs places », dit-elle dans un sourire.

Un programme bien chargé en somme. Qu’elle mène toute seule ? « Je suis seule sur l’émission, mais j’ai autour de moi un volontaire en service civique que je forme progressivement et qui part en reportage. Ponctuellement, il y a aussi des stages conventionnés qui viennent de la Skol Radio, du DUT de journalisme de Lannion, du master Journalisme Reportage et Enquête de Sciences Po Rennes. J’ai aussi quelques bénévoles, notamment des bénévoles de la CIMADE qui produisent une chronique toutes les deux semaines ».

Si elle confesse ne plus trop avoir le temps d’écouter autant la radio depuis qu’elle est devenue maman, Lucie aime le documentaire radiophonique, dont ceux d’Arte Radio. Sur Canal B, l’émission Bonjouïr. Et alors, quel a été son souvenir le plus marquant à la radio ? « Forcément, la première fois que l’on parle dans un micro, l’appréhension, le stress. Avec la répétition et le vécu, ça devient moins intense. » Elle réfléchit un moment et puis continue, « en février 2020 j’ai fait un documentaire sur les travailleuses du sexe à Rennes, soit juste avant le confinement. Ça a été un moment très fort d’entendre, de laisser parler ces personnes ».