Quelle utilité sociale pour les radios associatives ?

À la fois médias, associations et lieux d’apprentissage, les radios associatives de Bretagne constituent, par leur capacité à donner la parole, un point d’entrée de l’ensemble de la population bretonne dans l’espace médiatique.

Cet accès direct à l’outil radiophonique est à la fois l’expression d’un droit démocratique, mais aussi une possibilité concrète d’apprentissage et de formation à des techniques et technologies modernes d’expression : par là même, les radios associatives de Bretagne participent à une désacralisation et à une déconstruction du pouvoir d’imposition symbolique des médias.

Cependant, l’une des difficultés des radios associatives – comme pour bon nombre d’acteurs·trices de l’Économie Sociale et Solidaire et de la Culture – est d’apprécier à sa juste valeur l’impact de leurs activités auprès des publics et sur le territoire. Le réflexe consiste trop souvent à évaluer l’impact d’une radio à partir d’une approche quantitative – via une mesure de son audience. Les mesures d’audience de la radio en général ont pour objectif principal de justifier de tarifs publicitaires auprès d’annonceurs.

Les radios associatives ont cette particularité de ne faire partie ni du secteur marchand, ni du secteur public. Longtemps associées au « tiers-secteur médiatique », les radios associatives conduisent leurs activités au croisement de différents champs thématiques : Arts et Culture, Monde associatif, Économie Sociale et Solidaire, Éducation Populaire. Comment, dès lors, faire reconnaître la multiplicité de ces interventions dans une seule et unique approche quantitative ?

Les radios associatives adhérentes à la CORLAB se reconnaissent davantage dans une approche autour de l’utilité sociale, et ce afin de tenir compte de l’ensemble des activités réellement déployées par les radios sur leur territoire (formation et accompagnement des bénévoles, éducations aux médias et à la citoyenneté, vie associative, prescription musicale et culturelle, etc.).

Alors que la confiance de la population envers les grands médias s’effrite, ce travail d’évaluation collective vise à réaffirmer la nécessité de consolider des espaces d’expression indépendants, alternatifs, participatifs, libres, solidaires et citoyens.

 

Cette évaluation a été réalisée dans le cadre du dispositif local d’accompagnement qui permet à une association d’être accompagnée par un·e consultant·e sur une action qui favorisera son développement. Plus de 780 bénévoles, salarié·e·s et partenaires y ont participé. Ces travaux ont donné lieu à la formalisation d’un panorama de l’utilité sociale des radios associatives de Bretagne. Sur cette base, des critères et indicateurs d’évaluation ont été élaborés.

59 indicateurs statistiques ad hoc ont été renseignés par les radios. Ils portaient notamment sur leurs activités et pratiques. Ce travail a nécessité la réalisation de recherches spécifiques : durée et nature des informations locales produites, recensement et analyse des projets partenariaux conduits par les radios sur le territoire, étude des playlists, étude des publics accueillis…

Un questionnaire auprès de 138 bénévoles. Entre la moitié et deux tiers des bénévoles de chaque radio a répondu à celui-ci. Il constitue un échantillon globalement représentatif. Le nombre de répondant·e·s par radio est proportionnel au nombre de bénévoles par radio. Il en est de même concernant les profils des répondant·es (genre, âge et CSP).

Un questionnaire auprès de 566 auditeurs et auditrices, diffusé via Facebook. Il s’agit donc d’un panel plutôt fidèle et qui suit la radio sur internet.

23 entretiens semi-directifs menés par le coordinateur de la CORLAB auprès de divers·e·s partenaires : des institutions (conseils départementaux, services jeunesse des villes, services d’université…), des associations locales et un groupe de musique. Entre 3 et 4 partenaires de chaque radio ont été entendu·e·s. Les questions portaient notamment sur ce que leur apporte la radio et la nature de la relation entretenue avec elle.

12 sessions de travail, réparties sur un an, ont eu lieu dans un contexte de crise sanitaire complexe. Les travaux se sont déroulés de février 2020 à mars 2021.