MÉMOIRES DE VI(LL)ES : GUÉMENÉ-SUR-SCORFF / RADIO BRO GWENED


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Le groupe de Guémené-sur-Scorff © Sarah Chajari – L’atelier du canal

La radio Bro Gwened a posé ses micros à la résidence autonomie du Clair Logis de Guémené-sur-Scorff à la rencontre de 11 habitants, réunis dans une pièce à vivre attenante au réfectoire. La directrice de la structure, Nathalie Gautier-Heurtin, est très impliquée dans le projet et met en confiance les participants dans une ambiance chaleureuse. Certains sont là pour écouter, d’autres ont des histoires à raconter, en français mais aussi en langue bretonne (épisodes 4 et 5).

LES HABITANT·E·S

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Guy Le Poher et Lucien Kerjean sont nés à Guémené-sur-Scorff en 1935 et 1950 et ont respectivement travaillé en tant que boulanger et électricien. Quant à Jean Gainche (82 ans), véritable vedette locale, il a été coureur cycliste et électricien. Albertine Le Floc’h (94 ans) et François Le Roux (89 ans) appartiennent à la même génération, ils sont restés enracinés dans le Morbihan comme agricultrice et maréchal-ferrant. Un bel hommage aux métiers manuels, qui connaissent d’ailleurs une nouvelle popularité de nos jours ! Trois d’entre eux sont partis travailler en région parisienne : Joseph Le Blevec (90 ans) en tant que chimiste, Thérèse Cano (76 ans), comme assistante dans les écoles maternelles et Rollande Belin (103 ans) – l’honorable doyenne du groupe – qui exerça le métier d’infirmière, avant de renouer avec leurs racines guéménoises.

Albertine Le Floc’h © Sarah Chajari – L’atelier du canal

François Le Roux © Sarah Chajari – L’atelier du canal

Jean Guinche © Sarah Chajari – L’atelier du canal

Sylvie Didier © Sarah Chajari – L’atelier du canal

Joseph Le Blevec © Sarah Chajari – L’atelier du canal

Rollande Belin © Sarah Chajari – L’atelier du canal

Pierre Le Ferrec © Sarah Chajari – L’atelier du canal

Thérèse Canot © Sarah Chajari – L’atelier du canal

Lucien Kerjean © Sarah Chajari – L’atelier du canal

LES ÉPISODES

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Une sacrée étape du Tour de France

C’est en 1958 que le coureur cycliste Jean Gainche a gagné l’étape Versailles-Paris du Tour de France ! Lors du sprint final, il a battu les coureurs phares de l’époque : André Darrigade (champion du monde de l’époque) et Jean Graczyk. Aujourd’hui, il prend la pose avec fierté devant une photo de lui sur son fidèle destrier.

« Je n’aimais pas les étapes de montagne, c’était trop dur. J’ai gagné une étape à Versailles en 1958. Pour moi c’était important de la gagner. »

Jean Gainche

Lorient – Guémené-sur-Scorff

Guy Le Poher nous raconte son enfance et ses déménagements entre Lorient et Guémené-sur-Scorff, liés tantôt au travail ou à la guerre. Ses parents tenaient une boulangerie à Lorient et sont revenus dans la cité des Rohan en 1943 lorsque les bombardements ont commencé en ville. Il vivait alors dans la maison de son grand-père, au sein quartier du « Grand Moulin ». Un nom qui souline l’omniprésence de l’eau sur la commune, comme en atteste la présence de lavoirs, fontaines et moulins le long du Scorff.

« Maintenant il n’y a plus grand monde mais à l’époque il y avait les réfugiés de Lorient, c’était plein de partout. »

Guy Le Poher

Le métier de boulanger

Les commerces de Guémené-sur-Scorff, Guy Le Poher les connaît bien car en 1965, il s’est installé dans la ville en tant que boulanger. On y comptait alors six boulangeries ! Jusqu’en 1972, la pause hebdomadaire des écoliers n’avait pas lieu le mercredi comme aujourd’hui, mais le jeudi, et à Guémené-sur-Scorff ça tombait bien puisque le jeudi c’était déjà le jour du marché. Les gens faisaient leurs courses ce jour-là, s’octroyant au passage une petite douceur…

« Il y avait tous les commerces et pas mal d’épiceries, ça travaillait bien partout ! »

Guy Le Poher

La moisson à Belle-Île-en-Mer (conversation en breton Pourlet)

Albertine Le Floc’h a vécu à Melrand avant de tenir la ferme de ses parents à Bubry, puis plusieurs fermes et enfin d’arriver à Séglien au nord de Guémené-sur-Scorff où son petit-fils travaille toujours. Entre deux rires, Albertine raconte son mariage à 18 ans, son père qui allait faire la moisson à Belle-île avec la moissonneuse qu’il avait achetée, et la vie des paysans à son époque.

Bevet he deus Albertine e Melrand a-raok derc’hel tachenn he zud e Bubry, ha meur a dachenn betek arru e Seglian, lec’h mad eo c’hoazh he mab bihan é labourat. Etre daou c’hoarzh e konta Albertine he eured da 18 vlez, he zad a yae d’ober ar blezad da Belle île get ar vederez en doa prenet, ha buhez ar beizanted en he amzer.

 

« On faisait tout à la main, hein ! Le foin, la moisson, tout, tout ! Ramasser la moisson, il fallait faire des cordes pour faire les gerbes ! »

« Tout a veze graet get an daouarn, heñ ! Ar foen, ar blezad… tout tout! Serriñ ar blezad, e veze ret gober kordoù, kordennoù da gober jerboù! »

Albertine Le Floc'h

Le temps des fêtes (conversation en breton Pourlet)

Nous sommes à la mairie de Guémené-sur Scorff avec Fine Darcel, externe à la résidence du Clair Logis, au micro de Jeanne Chevrel. Née à Langoelan, Fine a vécu à Ploerdut puis à Séglien avec ses parents. Elle s’est installée à Locmalo avec son mari et ses quatres filles où elle a commencé à vendre des crêpes. Très attachée à la langue et la culture bretonne, Fine Darcel raconte Guémené : les grandes foires du jeudi, les marchands venus de Lorient acheter les produits de la ferme, les bals le dimanche, les nombreuses boutiques de Guémené, la fête de la mi-carême avec ses chars fleuris… A la fin de l’enregistrement, Madame Quidu explique comment se fabrique l’andouille de Guémené.

E ti-kêr Ar Gemene eh omp gant Fine Darcel, aterset gant Jeanne Chevrel. Ganet e Laoulan, ema bet é vevañ e Ploerdut hag e Seglian gant he zud é klask tachenn. Gant he gwaz hag he feder merc’h, aet oa da chom da Loc’hmalo lec’h ma he doa kroget gwerzhañ krampouezh. Entanet gant yezh ha sevenadur ar vro, e konta Fine Darcel buhez ar Gemene pa oa en he brud : ar foeroù bras d’ar yaou, marc’hadizion ag an Oriant a zae da brenañ produoù an dachenn, ar baloù d’ar sul, ar stalioù e-leizh er Gemene, fest ar mi-carême gant ar charroù bocheded… E fin an enrolladenn e tislega an Intron Quidu penaos resis e vez fardet andouilh ar Gemene.

 

Aujourd’hui encore « venir à Guémené j’aime ça, oh oui ! »

Ha c’hoazh hiriv « Dont d’ar Gemene m’en em blija, O ya ! »

Fine Darcel

GUÉMENÉ-SUR-SCORFF : CAPITALE DU PAYS POURLET

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La cité de Guémené-sur-Scorff doit son origine à l’installation d’un lignage seigneurial au XIe siècle, peut-être autour d’une «motte». Le premier seigneur nommé Guégant donne son nom au Kemenet­ Guégant que l’on peut traduire par le domaine de Guégant, d’où l’appellation Guémené au XIVe siècle, puis Guémené-sur-Scorff en 1801.

Aux confins de la Cornouaille et du Vannetais, le site est naturellement défendu par des hauteurs et des marécages. Surplombant le Scorff, cette position stratégique permet de contrôler le pont. En outre cette rivière, autrefois bien plus large, justifie dès le Moyen Âge, le développement d’un artisanat lié à l’eau, source de revenus pour les seigneurs.

Au Xllle siècle, le fief devient le domaine des Baumer, puis des Rohan-Guémené jusqu’à la Révolution. Pendant presque huit siècles, chacun de ces seigneurs édifie le château devenant une imposante forteresse défendue par des tours et des remparts.

Durant la guerre de Succession de Bretagne (1341- 1365), la cité pâtit du conflit entre les Montfort et les Blois-Penthièvre. Elle est occupée par les troupes d’Édouard Ill, roi d’Angleterre et allié des Montfort, de 1342 à 1369. Par le biais de mariages successifs, le château revient aux Rohan qui, à la fin du Moyen Âge et au début de la Renaissance, en font une véritable demeure de plaisance.

Au XIIe siècle, Guémené est décrite comme «moult, riche et marchande». Des marchands s’établissent au bord de l’axe principal et en font une cité renommée pour ses foires et ses marchés. Cette période est faste pour la seigneurie qui est érigée en principauté en 1570.

Au XVIIIe siècle, les Rohan-Guémené quittent leur domaine. Le château est démantelé et de nouveaux propriétaires construisent une résidence privée qui devient l’Hôtel Moderne (aujourd’hui hôtel de ville).

Il est source d’inspiration de nombreux peintres post­ impressionnistes qui y séjournent. Autrefois fief important des Rohan-Guémené, la Petite Cité de Caractère®a aujourd’hui préservé son riche patrimoine médiéval et exerce toujours son influence sur l’ensemble historique des vingt communes du Pays Pourlet dont elle est la capitale. Sa renommée est connue au-delà de ses frontières grâce à sa spécialité gastronomique : l’andouille de Guémené­ sur-Scorff.