La radio faite maison !

à la découvertE DE
QUARTIER DES ONDES

[Initialement publié le 25 août 2023] 

Ce matin de juin 2023, à la sortie de la ligne A de métro rennais, à son terminus « La Poterie », le soleil tape déjà fort et contraste sérieusement avec la nuit sous terre. On longe le métro aérien sur quelques mètres avant de bifurquer vers la gauche, en bas d’un petit escalier : nous voici à Quartier des Ondes ! Née web radio en 2019, elle émet depuis mars 2023 en DAB+ sur la métropole rennaise. Elle a adhéré, dès lors, à la CORLAB (les radios de notre fédération doivent émettre sur les ondes hertziennes). C’est la dernière radio à avoir rejoint notre fédération !

Les locaux de la station se situent au rez-de-chaussée d’un immeuble, dans le quartier du Blosne et ont, de fait, pignon sur rue. Élise Romer, la coordinatrice, est sur le pas de la porte, elle m’accueille avec un grand sourire de bienvenue. Son teint subtilement halé, trahit des vacances dont elle vient tout juste de revenir et où son compagnon l’a demandée en mariage, « on me chambre à me dire que c’est vieux jeu », relève-t-elle en rigolant. Peut-être, mais c’est charmant !

Nous nous posons sur une petite table juste à l’entrée de la radio, « c’est utile l’été lorsqu’il y a beaucoup de monde », explique Élise. En effet, les locaux sont assez petits, d’autant qu’ils sont mutualisés avec l’équipe de Radio Kerne détachée sur Radio Roazhon. Ce sont donc sept personnes qui s’y côtoient au quotidien, sans compter les 90 bénévoles de Quartier des Ondes qui y viennent régulièrement. Morgane Cotten de Kerne arrive justement pour débuter sa journée de travail. « J’ai fait la Skol Radio la même année qu’elle », me glisse la coordinatrice. Belle entrée en matière pour retracer son parcours.

Après un diplôme d’animation touristique et deux années dans ce secteur, la jeune femme bifurque vers un DUT carrière sociale en animation socio-culturelle. Elle enchaîne avec sept années de travail dans un accueil de loisirs, ou successivement, elle est animatrice puis directrice. Avant de quitter son poste, et donc, rejoindre la Skol Radio. Dès sa sortie de formation, en juillet 2021, elle est engagée à Quartier des Ondes en tant qu’animatrice. « La radio ne fonctionnait qu’avec des bénévoles, mais lorsqu’elle a obtenu la fréquence en DAB+ avec l’Arcom, le conseil d’administration a décidé de recruter quelqu’un », explique la jeune femme. « En fait, c’est Sylvain Delfau, le directeur de la Skol Radio et de Radio Laser, qui a parlé de moi à Nathanaël Simon le président de notre association (qui est par ailleurs, l’ancien coordinateur régional de la CORLAB). Il lui a dit, « c’est le profil qu’il te faut » ». Banco ! Elle devient la première salariée de l’association Le Souffle Et La Flamme, qui porte Quartier des Ondes, et, comme celle-ci ne fait pas que de la radio (nous allons y venir), le poste requiert non seulement des compétences d’animatrice radio et de technicienne, mais plus encore d’animatrice socio-culturelle. Soit : du sur-mesure pour Élise. Très vite, elle devient la coordinatrice et embauche la deuxième salariée : Aurélia Thomas, qui devient animatrice. « Elle est également passée par la Skol Radio, nous sommes trois de la même promo dans nos locaux ». Puis Pauline est arrivée en alternance en septembre 2022 pour assister à la coordination (elle quittera l’équipe ce mois de septembre 2023) et enfin Alan en service civique sur la saison 2022-2023.

Le Souffle Et La Flamme

Quartier des Ondes est donc portée par l’association Le Souffle Et La Flamme, qui existe depuis 2008. Un fonctionnement original pour ce média, car l’asso’ est composée de trois pôles : l’un artistique, l’autre de solidarité internationale (SI), et donc, le pôle radio, dernier-né du projet. « L’association a été montée à l’époque par Victor, d’origine vénézuélienne, qui à la base fait du conte. Le but de l’association, c’est faire de la solidarité de la plus petite échelle à la plus grande échelle, notamment dans d’autres pays, et au début, au Venezuela », relate Élise. Avec l’envie de créer de la solidarité dans les quartiers populaires via la culture et l’art, « par exemple, des fresques ont été réalisées, il y a eu des ateliers de marionnettes… et le lien qui s’est créé au fur et à mesure avec les habitant·e·s, a mis en exergue qu’iels avaient besoin, et envie, d’un média qui montre le positif dans le quartier et pas toujours le négatif. C’est de là qu’est née la radio ».

Désormais, la radio a pris la place la plus importante au sein de l’association, notamment sous l’impulsion d’Élise, à qui l’on a laissé carte blanche, « pour moi, ça a tout de suite été important de faire du hors les murs, d’appréhender la radio dans une démarche socio-culturelle. Donc, on a été voir les gens et ensuite on a composé une grille de programmes tout en collant avec le projet envoyé à l’Arcom ». Les projets des deux autres pôles perdurent également et se mêlent souvent avec ceux de la radio : comme le festival Ayudar !, organisé en juillet 2023.

Une radio par et pour les habitants des quartiers populaires

Un homme arrive à la radio, « bonjour, vous cherchez qui ? », puis Élise le reconnaît et s’en va un instant pour répondre à sa requête. Il y a beaucoup de passage ce matin, « oui, c’est souvent comme cela ! », m’indique la coordinatrice à son retour. Ouverte aux habitant·e·s, à l’image de la ligne éditoriale du média « une radio par et pour les habitant·e·s des Quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV). Même s’il n’y a pas que des gens issus des QPV, c’est la seule règle qui régisse notre ligne éditoriale », indique la jeune femme. La place des langues y est également présente, « la mutualisation avec Radio Kerne, qui ne diffuse qu’en breton, s’est d’ailleurs jouée sur ce volet-là », précise Élise. Au Blosne, ce sont 13 langues parlées qui sont identifiées, l’idée est donc de pouvoir les entendre sur Quartier des Ondes, « par exemple, on essaie de faire faire des petits journaux dans les langues du quartier, en turc, érythréen ».

La radio organise très souvent des plateaux délocalisés, notamment au sein du quartier, afin d’aller à la rencontre des habitant·e·s. Une façon de prendre le pouls du quartier, de sensibiliser et de recruter des bénévoles. « On se retrouve dans le rapport d’utilité sociale de la CORLAB, d’abord, parce que la radio, c’est par et pour les habitant·e·s des QPV rennais. On essaye de donner la parole aux personnes qui sont sous représentées dans les médias : par exemple, on ne parle pas de sport, on ne parle que de handisport, on fait des émissions avec des personnes allophones qui apprennent le français, on donne, entre autre, beaucoup la parole aux jeunes, aux personnes âgées… », détail Élise avec enthousiasme. Notamment, grâce aux ateliers d’éducations aux médias, « on n’arrive pas clé en main sur les ateliers d’éducation média, d’autant que j’arrive vraiment avec la culture de l’éducation populaire. Donc je ne viens pas en disant, « on va faire comme-ci, on va faire comme ça ». On s’adapte toujours au besoin soit du professeur, soit de la personne qui souhaite travailler avec nous, et ce, dans n’importe quel projet. On connait le quartier, on n’arrive pas comme un cheveu sur la soupe et nous travaillons sur la continuité éducative, autour de la parentalité… afin d’être présent·e·s à tous les échelons ».

Et puis cette parole, est également recueillie en recensant les goûts musicaux habitant·e·s lors des plateaux et micros-trottoirs : « on leur donne une fiche type et iels y notent ce qu’iels voudraient écouter ». Cela donne une playlist avec beaucoup de musique du monde, représentative des différentes cultures qu’il y a dans les QPV et notamment au Blosne. Mais également du hip hop, de la soul, du rap, « les musiques les plus demandées ».

Le tout, compose une grille de programmes de 13 émissions, avec un thème par mois.

Depuis l’arrivée d’Élise, un nouveau CA s’est formé avec l’idée de retravailler la ligne éditoriale de Quartier des Ondes et plus globalement le projet politique du Souffle de la flamme. Pour l’avenir, la radio souhaiterait pouvoir créer une rédaction par QPV à Rennes, soit cinq (Blosne, Champs-Manceaux, Cleunay, Gayeulles et Villejean). De quoi produire un journal par jour dans les différents quartiers populaires rennais. Stay tuned !