[Initialement publié le 14 février 2023] 

C’est une journée de décembre plutôt maussade, le lendemain c’est la veille de Noël, mais à Arvorig FM, ce n’est pas encore les vacances ! Une partie de l’équipe est là, vêtue de pull de Noël, justement, donnant un côté chaleureusement drôle à la rencontre. C’est Pauline Daniel qui m’accueille avec un grand sourire communicatif. La jeune femme a été recrutée en septembre 2022 pour remplacer Reun Tréguer à la coordination. Depuis, les deux travaillent ensemble à la passation, un moment d’apprentissage bienvenu, qui prend fin ce mois-là. « Mais j’ai encore beaucoup à apprendre ! », glisse-t-elle humblement. Pauline et la radio, c’est une histoire qui commence à Radio U durant ses études. Après un service civique là-bas et quelques expériences journalistiques, elle signe son premier contrat à Arvorig en 2014 pour un remplacement de huit mois, avant de travailler durant cinq années à RCF Finistère. Les radios asso’, elle connait donc très bien ! Néanmoins, ce poste de coordinatrice, c’est un nouveau challenge, « je n’avais plus envie de n’être que journaliste, j’ai postulé ici pour apprendre tout ce qu’il y a derrière une radio, tout ce que l’on n’entend pas à l’antenne », relate-t-elle avec l’assurance et la clarté des passionnées.

La radio du Léon

Et dans tout cela, il y a bien sûr, l’histoire même d’une radio. Pour Arvorig, tout commence en 1995 à Commana (29) dans les Monts d’Arrée. Cette année-là, l’association « Ar Skinoù-Arvorig FM » voit le jour avec pour objectif : la création d’une radio en langue bretonne. L’idée ? Favoriser le développement de la langue avec une programmation où l’on entendrait exclusivement du breton. Le territoire de diffusion touche le Nord Finistère (du Conquet à Morlaix, en passant par la presqu’île de Crozon et les Monts d’Arrée, donc) soit le pays du Léon, dont le parler « léonard » comporte des caractéristiques qui font tout son charme. Et c’est bien cette identité et ces spécificités que l’association commence à mettre en avant en 1998, lorsqu’elle obtient une fréquence sur la bande FM. La même année, dans le sud Finistère, nait également Radio Kerne qui prône les mêmes valeurs et se concentre plutôt, elle, sur le parler « cornouaillais ». Les deux font d’ailleurs partie du réseau Brudañ ha Skignañ (BHS) dont Erwann Blanchard, journaliste en poste à Arvorig en est le coordinateur. C’est plusieurs programmes que partagent les quatre radios de la fédération, dont l’émission « Trouz er gêr », littéralement « du bruit dans la maison » de 13h à 14h tous les midis de la semaine et produite par Arvorig. Le pitch ? Donner la parole aux bretonnant.e.s du coin et évoquer, entre autre, la vie culturelle locale, avec à la manœuvre trois des six salarié.e.s de la radio : Pauline Daniel Iffig Kalvez et Karolina Rufflé. Du côté des bénévoles, c’est près de 40 personnes qui s’investissent pour la station, dont une bonne dizaine qui interviennent régulièrement à l’antenne.

Au plus près des auditeur.rice.s

Concernant l’éditorial, la radio se veut d’actualité locale, avec cette spécificité de la langue bretonne, « l’idée, c’est que l’on puisse entendre du breton toute la journée sur nos ondes », explique Pauline. « On espère être écouté de toutes et tous, brittophone ou non, notamment grâce à notre playlist musicale éclectique », précise la coordinatrice, « car l’on se veut généraliste ». Avec l’envie d’être au plus proche de ses auditeur.rice.s. Dans ce but, Arvorig a pu investir dans un studio mobile grâce à une enveloppe de 7000€ (le chèque symbolique est fièrement affiché dans les locaux) récolté lors de la Redadeg 2022. Cela leur permet de faire des directs du festival Kan Al Loar, ou bien plus récemment et pour la première fois : un jeu radiophonique fun et pédagogique au collège Diwan de Guisseny, « un moment super », se rappelle Pauline, « on aimerait pouvoir réitérer dans d’autres écoles, ce sont des terrains propices à la langue bretonne ». Et tandis que je lui pose une question sur laquelle la coordinatrice sèche, elle la repose à sa collègue en français avant d’ajouter, « je crois que c’est la première fois que l’on parle en français ? ». Eh oui : que ce soit à l’antenne ou en studio, c’est le breton que l’on utilise ici !

Mais Arvorig FM est aussi tournée vers le monde ! En témoigne sa nouvelle émission en partenariat avec Radio Djiido (en Nouvelle Calédonie) : « Kanaki Breizh » (« Breizh Kanaki » de leur côté), où chaque mois Karolina Rufflé échange une playlist d’artistes locaux avec son homologue à Nouméa. Des musiques traditionnelles respectives au métal en passant par le rap, l’expérience permet de faire découvrir aux audit.eur.rices la diversité et la richesse musicale de chacun. Tout en mettant en lumière la lutte en faveur de les cultures minoritaires et régionales.

Quant à l’avenir, avec le lancement du DAB+ à Brest courant 2023, la radio fera son entrée sur les ondes de la métropole. Elle arrivera également à Morlaix en FM sur le 89.8 Mzh. Couvrant de fait désormais tout le Léon, ou presque. « À terme, nous aimerions avoir un studio à Brest. Et pourquoi pas à Morlaix, on peut rêver », annonce la nouvelle coordinatrice amusée. Comme symboliquement, leur site internet est en cours de réfection et affichera prochainement peau neuve. De belles choses à venir !