Episode 3 – Plum’FM

AP FEMMES

Le projet AP Femmes (L’Appropriation de la connaissance de la Parole des Femmes en difficultés et de leur pouvoir d’agir, entre la société civile et la recherche) a été initié en mars 2022 et est lauréat d’un financement de 24 mois de la Région Bretagne dans le cadre de l’appel à projets « Recherche et Société ». Il vise dans un premier temps à rapprocher la FR-CIDFF (Fédération Régionale des Centres d’Informations sur les Droits des Femmes et des Familles) de Bretagne et le laboratoire VIPS2 (Valeurs, Identités, Politiques, Socialisations et Sports) de l’Université Rennes 2 (plus d’infos en cliquant ici), autour des problématiques d’égalité femmes-hommes et de lutte contre les violences faites aux femmes.

 

En partenariat avec
LRA_epsiode3_AP-FEMMES

RÉALISATION

Jessica QuirinPlum’FM

 

INTERVENANT·ES

Antoine Eveillé, coordinateur régional à la FR-CIDFF de Bretagne

Gaëlle Sempé, maîtresse de conférences en sociologie et STAPS, enseignante-chercheuse à l’Université de Rennes 2, membre du laboratoire VIPS2 (Valeurs Innovations Politiques Socialisation et Sports) à Université Rennes 2

 

A propos

Ce 12 juin 2024 est une journée de printemps rayonnante. Le Centre d’Informations sur le Droit des Femmes et des Familles (CIDFF) d’Ille-et-Vilaine se trouve à Rennes, dans un écrin vert, à deux pas des bords du canal d’Ille et Rance. Leurs locaux sont au dernier étage d’un bâtiment partagé avec TV Rennes. On y retrouve la chercheuse Gaëlle Sempé et le coordinateur régional du CIDFF Bretagne, Antoine Eveillé. Un couloir donne sur des bureaux de permanences juridiques ou d’accompagnement, et au fond, une salle de réunion. Elle sert souvent pour l’organisation des ateliers ou des actions collectives de sensibilisation aux violences sexistes et sexuelles (VSS). On s’y sent un peu comme dans une bulle.

À la base du projet « AP Femme », une première étude de 2019 de la Fédération régionale du CIDFF Bretagne qui coordonne un livre blanc : « Lever les freins pour l’autonomisation des femmes ». À cela s’ajoute une rencontre entre la chercheuse et le CIDFF lors d’un événement dédié à rapprocher la société civile de la recherche universitaire à l’Université Rennes 2 en mai-juin 2021. « Ça a tout de suite matché », abondent nos deux protagonistes. « Sur le fond, nous avons des sensibilités communes », ajoute Gaëlle, « notamment autour des violences faites aux femmes ». Parallèlement, l’appel à projet « Recherche et société » de la région Bretagne finit de sceller ce partenariat scientifique.

Un premier constat : « nous souhaitions valoriser la parole des femmes qui s’évaporent dans les chiffres ». C’est ainsi que se structure la recherche scientifique « AP Femmes ». « Nous avons travaillé sur l’appropriation de la connaissance de la parole des femmes en situation de vulnérabilité et de leur pouvoir d’agir ». Les deux partenaires se retrouvent alors autour d’une volonté commune : visibiliser à la fois la parole et les trajectoires de femmes en situation de vulnérabilité et/ou victimes de violences. Elles sont les bénéficiaires de l’accompagnement associatif mais aussi militantes des CIDFF de Bretagne. Le but ? Mieux saisir les ressorts de leur autonomisation par et dans ce travail d’accompagnement.

La rencontre avec ces femmes s’est alors faite en immersion continue avec les professionnelles. Quatre dispositifs d’accompagnement spécifiques ont été choisis, comme « Toutes sports, toutes sportives » (cf podcast « Plus d’excuse« ), mis en place par le CIDFF 22. Il s’agit d’un format d’atelier précurseur en Bretagne. Il permet de voir comment, grâce au sport, ces femmes peuvent lever certaines dispositions. Ou encore la permanence juridique du CIDFF 35, où l’on fait face notamment à des violences intrafamiliales et où l’on accompagne les femmes qui en sont victimes. En France, cela représente 200 000 femmes touchées chaque année.

Dans une approche bienveillante, la recherche a comporté 77 observations d’une journée ou d’une demi-journée, soit 230 heures et 160 bénéficiaires rencontrés. « Il faut noter la grande diversité des femmes rencontrées », souligne Gaëlle Sempé qui ajoute, « pour certaines, il y avait une dimension cathartique ». Ce sont 43 entretiens biographiques, qui ont par ailleurs été menés, de sept professionnels et 36 bénéficiaires. En effet, l’idée qu’une personne tierce puisse participer aux entretiens n’a pas posé de problème et a participé à la diversité du champ biographique.

À partir de ces rencontres, Gaëlle Sempé a pu écrire des portraits sociologiques de ces femmes. Avec l’enjeu d’analyser le processus individuel et de mettre en évidence les rapports d’oppressions plurielles et enchevêtrées.
Avec une question en toile de fond : c’est quoi l’autonomisation ?

« C’est une notion ambivalente. Spontanément, on la représente de façon positive, car c’est assimilé à une notion d’émancipation, qu’il faut replacer dans un contexte universaliste féministe. Notamment avec l’accès économique grâce au retour à l’emploi. Or, le marché du travail est impitoyable et genré. Cela n’est donc pas forcément une émancipation. On peut aussi se représenter cette notion comme une injonction à se responsabiliser à un moment de délitement de l’État providence. Ce qui peut être très pesant, notamment sur les publics en difficultés », explique Gaëlle Sempé, qui précise avoir appréhendé ce modèle de réflexion à partir des travaux de la sociologue Élisa Herman.

Trois dimensions de l’autonomisation dans le travail associatif et militant ressortent ainsi de la recherche : la dimension économique, administrative ainsi que la réflexivité autour de la construction de soi – la propension du récit de soi à dire les violences. Gaëlle Sempé y pose alors quatre analyses du système d’oppression des femmes : le rapport au temps – soit le temps et la division du temps ; le rapport aux institutions ; le rapport au genre – aux hommes et les socialisations.

La recherche rend donc compte, à partir de portraits sociologiques et d’expériences plurielles de la précarité et des violences, et du processus d’autonomisation complexes, discontinus et réversibles selon les parcours de vie des femmes, leurs conditions et contextes d’existence et la nature de l’accompagnement associatif. Il en ressort un rapport de 300 pages.

« Une des premières données, c’est que l’on a beau ne pas rentrer par la porte des violences, on y arrive quand même », relate Gaëlle Sempé. « C’est aussi un côté émotionnel difficile, les violences sont partout exponentielles et violentes ».

Les autres épisodes

Episode 1 : COMMUNS

Episode 1 : COMMUNS

Episode 1 - Radio Kreiz Breizh COMMUNSTerre de Liens Bretagne est l’association qui porte le projet de recherche participative COMMUNS, en...

Episode 2 : CIRCUL’AB

Episode 2 : CIRCUL’AB

Episode 2 - Radio Bro Gwened CIRCUL'AB Circul’AB est un projet de recherche participative qui explore les conditions de développement de...

Episode 4 : FORET

Episode 4 : FORET

Episode 4 - Timbre FM FORET En réponse aux défis posés par le changement climatique, FORET est un projet de gestion forestière et des tourbières sur...

Episode 5 : FABMOBZH

Episode 5 : FABMOBZH

Episode 5 - Transistoc'h FABMOBZHLe projet FABMOBZH est coporté par Le Lieu-Dit, Pôle de Coopérations et d'Innovations Économiques et Sociales du...

Episode 6 : LESVI

Episode 6 : LESVI

Episode 6 - Radio U LESVILe projet LESVI a pour objectif de croiser la psychologie sociale et le théâtre contemporain sur les questions de genre et...

Episode 7 : JEB

Episode 7 : JEB

Episode 7 - Canal B JEBJeunes et Exil en Bretagne (JEB) est un projet de recherche coopérative mené par Coop'Eskemm, sous l'égide de Fransez Poisson...

Episode 8 : PECHKEUR

Episode 8 : PECHKEUR

Episode 8 - Radio Balises PECHKEURPorté par le cabinet d'expertise maritime Glaz (Lesconil) et cofinancé par la Région Bretagne, le projet PECHKEUR...

Episode 9 bonus : FORUM RAPPS

Episode 9 bonus : FORUM RAPPS

Episode 9 bonus - Canal B FORUM RAPPSCet épisode bonus a été réalisé lors du Forum régional « Recherches avec, par, et pour la société » organisé le...